Manufacture de Beauvais

Manufacture de Beauvais

Créée en 1664 par Louis XIV sur la route des Flandres, la manufacture nationale de Beauvais, réalise des tapisseries de basse lisse, sur métier horizontal.

La technique

La manufacture, détruite lors de l’incendie de la ville de Beauvais en 1940, vient s’installer sur le site des Gobelins. En 1989, dix métiers ont regagné la ville de Beauvais dans d’anciens abattoirs rénovés, tandis que douze métiers sont toujours installés sur le site de Paris. Par tradition historique, l’atelier parisien a gardé le nom du lieu où la manufacture a vu le jour en 1664.

Beauvais utilise exclusivement la technique de la Basse lisse dès le premier tiers du 18ème siècle. A Beauvais, la chaîne est généralement en  coton et tendue sur un métier horizontal. Tous les fils de chaîne sont embarrés de lices paires et impaires reliées à des pédales. C’est en actionnant ces pédales que l’on obtient le croisement des fils nécessaire à l’exécution du tissage. La trame est réalisée à l’aide d’une « flûte » en bois chargée de laine, de soie, de coton, de lin…. que l’on passe entre les fils de chaîne. Le licier est assis devant le métier, les lices sont placées sous lui, d’où le nom de basse lice. Pour pouvoir se repérer pendant le tissage, le licier de basse lice commence par transférer sur un papier toilé au moyen d’un papier transparent les relevés au trait de l’ensemble de la composition, des formes et des valeurs. Cette transposition est  une image inversée du modèle original. Ce long travail  est une étape essentielle d’analyse où le licier utilise une écriture qui lui est propre. Ce papier toilé est ensuite cousu sous la chaîne du métier. Le licier travaille sur l’envers en suivant le dessin. Le bas licier contrôle l’endroit de son tissage au moyen d’un petit miroir qu’il glisse entre les fils de chaîne. La tapisserie est roulée au fur et à mesure de son exécution. Les tapisseries portent toutes le monogramme de la Manufacture « MBN », ce qui signifie Manufacture-Beauvais-Nationale.

L’histoire

La manufacture, détruite lors de l’incendie de la ville de Beauvais en 1940, vient s’installer sur le site des Gobelins. En 1989, dix métiers ont regagné la ville de Beauvais dans d’anciens abattoirs rénovés, tandis que douze métiers sont toujours installés sur le site de Paris. Par tradition historique, l’atelier parisien a gardé le nom du lieu où la manufacture a vu le jour en 1664.

La position géographique de la ville, centre commercial depuis des siècles,  située sur la route des Flandres à proximité des frontières, conduit Colbert et Louis Hinart à privilégier la ville de Beauvais lors de la fondation de la Manufacture en 1664.Ce dernier, en charge de l’établissement de la Manufacture, et qui était originaire de cette ville, se révèle particulièrement attiré par la forte tradition de tissage de la ville picarde, celle-ci offrant notamment un important marché d’étoffes diverses et de dentelles fabriquées dans la région.

Contrairement à la Manufacture des Gobelins dont la production était essentiellement destinée au roi, la Manufacture de Beauvais, fut à l'origine conçue comme une entreprise privée. La production des Gobelins était réservée au souverain.
Son installation à mi-chemin entre les Flandres, haut lieu de production de tapisseries, et Paris, correspondait en effet à la volonté politique de Colbert de couper la route à l'importation. En dépit des interdictions de Sully dès 1601, les achats à l’étranger s’étaient maintenu faute d’une offre suffisante à l’intérieur du royaume.
Cette entreprise, à l’origine destinée à survivre grâce aux seuls achats privés, doit très vite sa survie aux commandes royales venant compléter les carnets de commande. Dans les vingt premières années de son fonctionnement, la manufacture de Beauvais a fourni 254 tapisseries au Garde-Meuble royal.


XVIIe siècle

Dans un premier temps, les lissiers tissent des verdures ou paysages à petits personnages.  Puis sous la direction de Philippe Béhagle, dès 1684, de grands sujets historiques et bibliques sont au contraire tissés, comme Les Actes des Apôtres d'après Raphaël, ou la suite des Grotesques à fond jaune d'après Jean-Baptiste Monnoyer. De nombreuses pièces sont par ailleurs destinées à l'exportation, comme celle tissée pour le roi de Suède, Les Conquêtes de Charles XI d'après Lemke, Jean-Baptiste Martin des Batailles et Jean Bérain.


XVIIIe siècle

En 1722, Noël-Antoine Mérou (alors directeur de la Manufacture) intègre Jacques Duplessis, peintre et dessinateur afin de fournir de nouveaux cartons aux lissiers.
Après le départ de Duplessis, la direction est assurée par le peintre Jean-Baptiste Oudry et son collaborateur François Boucher, direction comparable à celle exercée par Le Brun aux Gobelins, ce qui concourt largement à l’éclatante réussite de ce siècle : Fêtes italiennes, Histoire de Pysché, Tenture chinoise... Les nombreuses commandes destinées aux cabinets diplomatiques participent au prestige des ateliers de Beauvais dans le monde entier.
Par ailleurs, dès cette époque, sont réalisées d’importantes productions de tapisseries pour sièges assorties aux motifs des tentures, créant ainsi des ensembles décoratifs homogènes : Les Jeux russiens d'après Le Prince, Les Amusements de la campagne et les Quatre Ages d'après Casanova, Les Pastorales à draperies bleues d'après Huet.


XIXe siècle

En 1851, Viollet le Duc réalise des cartons à la gouache pour des ornements sacerdotaux, alors que Desportes, Oudry, Le Prince servent encore de modèles pour des écrans, des paravents… Quelques panneaux décoratifs sont réalisés : Les Oiseaux d'après Cesbron, Le Jardin du Luxembourg d'après Quost en 1902.
C’est en définitive l’activité de création de tapisseries de sièges qui l’emporte à cette époque, et chaque génération apporte sa touche originale dans l’ameublement et la décoration de palais (Saint-Ange sous la Restauration, Starke sous la Monarchie de Juillet).


XXe siècle

Jean Ajabert, nommé à la tête de la Manufacture en 1917, veut insuffler un esprit de modernité. Il contacte alors des peintres "non académiques", Laugé, Veber, Taquoy, Karbowsky, Gaudissart…à qui il commande des cartons. D'importants ensembles mobiliers sont alors créés.

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Henri Matisse, Polynésie, la mer, 1948. Photo © Mobilier national, Phillipe Sébert

En 1936 la manufacture est rattachée au Mobilier national et gérée par une Administration générale dont dépendront aussi à partir de 1937 les Manufactures des Gobelins et de la Savonnerie. Beauvais prend alors une part active au renouveau de la tapisserie qui caractérise le XXe siècle. De nombreux artistes contemporains fournissent des cartons, tel Matisse (Polynésie, Le Ciel et Polynésie, La Mer), ou encore, Hartung, Le Corbusier, Picasso…
Cette ouverture se poursuit aujourd’hui, avec la contribution d’artistes contemporains provenant de toutes les tendances esthétiques (Raymond Hains, Eduardo Chillida, Roberto Matta, Patrick Tosani, Vincent Bioulès, Jean Le Gac, Shirley Jaffe…).
La Manufacture de Beauvais renoue par ailleurs en 2005 avec la tradition de tissage de tapisserie de sièges, qui avait fait sa renommée par le passé mais qui fut abandonnée dans les années 60. (lien Communiqué Elégance et Modernité) ; Elle invite alors trois artistes, Jean-Michel Othoniel, Paul-Armand Gette et Martine Aballéa, à concevoir des cartons pour recouvrir des sièges de styles différents appartenant aux collections.

Chaque année, environ cinq à six tapisseries « tombent de métier ».

Monogramme

Monogramme Beauvais

Les monogrammes des manufactures nationales garantissent la provenance de l’œuvre tissée.

Aujourd’hui, la Manufacture de tapisserie de Beauvais appose, au bas des tissages, sa marque d'identification. Ce marquage indique la constance d’une technique et d'un savoir-faire séculaire au service de la création la plus contemporaine

Le site

Les premiers bâtiments s’installent dans un enclos proche du rempart de la ville, au voisinage de la rivière le Thérain et de la route de Paris.

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Photo © Mobilier national, Thibaut Chapotot

Les ouvriers et de leurs familles bénéficient de petites maisons sur place qui occupent d’importants espaces. Quant à l’atelier de teinture, il est idéalement  installé dans un bâtiment près de la rivière.

La Manufacture de Beauvais occupe le même site jusqu’en 1940. A cette date,  la destruction des bâtiments originaux lors des bombardements, conduit les ateliers de la Manufacture de Beauvais à s’installer provisoirement dans l’enclos des Gobelins à Paris.
En 1976, le retour vers Beauvais s’amorce avec l’ouverture de la Galerie nationale de la Tapisserie, voulue dès 1964 par André Malraux. Un atelier de tissage de démonstration, préfiguration du déménagement à venir, est joint à la galerie d’exposition.
Le véritable retour est finalement réalisé en 1989, lorsque dix métiers regagnent la ville de Beauvais dans de nouveaux locaux, tandis que douze demeurent sur le site des Gobelins à Paris. Les nouveaux ateliers s’installent alors dans les anciens abattoirs municipaux réhabilités pour l’occasion. Cette construction du XIXe siècle accueille depuis cette date dans son bâtiment principal, les différentes activités et services de la Manufacture : bureau, bibliothèque, préparation des cartons et des laines, ourdissage des chaînes, tissage, travaux de recherche et suivi administratif.

Les tissages en cours

Atelier de Paris

Jean Le Gac, L’explorateur
Commission 2005, mise en route juin 2009

Tania Mouraud, Diary
Commission 2008, mise en route janvier 2011

Egils Rozenbergs, Reflets -Réflexions 1948.13
Commission 2012, mise en route juillet 2015

Peter Downsbrough, ET DE LA DONC
Commission 2016, mise en route septembre 2016 ; ensemble de 5 tapisseries

Atelier de Beauvais

Jean-Luc Parant, Météorites
Commission 2012, mise en route mai 2016

Mise à jour de la liste : septembre 2017